Succession à la chefferie Bangou : Le MINAT doit consulter les associations des Chefs Traditionnels du Ndé et des Hauts Plateaux.

Au cours de sa communication de sensibilisation le 22 Mars 2022, le préfet Ousmanou Yampen n’a pas pu cacher son embarra face à l’application des instructions  du MINAT.

Les princes Maurice Ngambou Kemajou et Arnaud Tchinhou Tayo avaient été désignés le 28 Janvier 2019 pour succéder au chef Bangou, SM Marcel Tayo II décédé le 16 Novembre 2018. Sauf que, contrairement à Arnaud Tayo, Maurice Ngambou Kemajou fils de SM Paul Bernard Kemajou 13ème de la dynastie, avait reçu l’onction de SM Vincent Kemayou, Chef des Bazou. Un élément majeur du processus  de l’arrestation des chefs Bangou que le clan théodore Datouo avait essayé de contester. D’ailleurs, le chef Bazou avait été aux côtés du fils de S M Paul Bernard Kemajou durant la période initiatique.

Quant à Arnaud Tchinhou Tayo, l’honorable Théodore Datouo, le Pr Shanda Tonme et quelques élites estiment que 39 ans de règne de SM Marcel Tayo II ne sauraient être considérés comme une période de régence. Notons que SM Paul Bernard Kemajou avait été forcé à l’exil par l’administration coloniale pour son activisme politique. C’est ainsi que Marcel Tayo II qui serait un fils adoptif de la cour royale Bangou fut porté à la tête du groupement. Nana Sinkam( adjoint de SM Kemajou en 1950) et ses frères princes du 12ème Roi se battirent en vain, mais opteront pour le retour à la lignée après le décès de SM Marcel Tayo II.

La bataille qui, depuis plus de 3ans a paralysé le fonctionnement de la chefferie de 2ème degré de Bangou est celle du choix entre la transformation d’une régence en lignée royale  ou le retour à la lignée royale originelle.

Dans une correspondance en date du 12 Mars 2022 adressée au Préfet du département des Hauts Plateaux,  le Ministre de l’Administration Territoriale (MINAT) Paul Atanga Nji avait porté son choix sur Arnaud Tchinhou Tayo. En réaction, Maurice Ngambou Kemajou qui, jusque là vivait au quartier Ngontchap sur un espace de la chefferie offert à Kuipou Nana Sinkam après sa sortie de laa’kam, sera officiellement installé à la chefferie où chaque jour, il reçoit des associations Bangou qui lui font  allégeance. Curieusement, hormis quelques élites, la frange de la population qui se réclame de Tayo Arnaud est  invisible. L’Arrêté préfectoral interdisant toute manifestation en ce lieu n’a produit aucun effet.

Le 25 Mars 2022, les  Pro Ngambou Kemajou ont été encore très nombreux à la préfecture de Baham pour suivre la communication de sensibilisation du préfet des Hauts Plateaux, Ousmanou Yampen. Débordée, la compagnie de la gendarmerie  de Baham a dû faire appel à un renfort de Bafoussam pour les contenir. Les tenants du retour à la lignée royale avaient ouï dire que cette réunion avait été convoquée pour élaborer les stratégies de mise en application de la lettre de Paul Atanga Nji. Face à cette tension sans cesse croissante à l’esplanade de la préfecture, Ousmanou Yampen a plutôt opté pour la sensibilisation. Une communication teintée de nuances, d’hésitations et des redites, trahissant l’état d’esprit d’une autorité administrative, coincée entre la « vérité », la réalité du terrain et la difficile application des instructions de la tutelle. On serait tenté de se demander si la décision du MINAT a tenu compte des rapports qui lui sont adressés ; à moins que ces derniers n’aient été que des copies dictées par des intérêts. Bangou a certes besoin d’un chef, mais ce n’est pas sur un coup de tête que cette question doit être réglée.

Focal

L’Association des chefs traditionnels doit s’y impliquer

La situation s’annonce très critique dans le groupement Bangou et le gouvernement devrait anticiper pour éviter le pire. Face à un peuple déterminé à défendre sa tradition, il ne serait pas louable de penser à l’utilisation de la force légitime, au risque de provoquer une catastrophe inutile. La succession des chefs traditionnels a souvent connu des ruptures de lignées, avec parfois l’installation au trône des individus venus de nulle part. Cette pratique relève d’un passé influencé par des conquêtes inter tribales et quelques fois, les humeurs du colon. Au 21ème siècle, aucun peuple ne devrait plus admettre des régences dont les origines sont douteuses et plus, en faire une lignée royale, quelles que soient les circonstances. D’ailleurs, les dispositions légales plaident en sa faveur. « Les chefs traditionnels sont en principe choisis au sein des familles appelées à exercer coutumièrement le commandement traditionnel » Article 8 du décret du 15 Juillet 1977. Les princes Bangou se battent depuis 1979 et bien avant dit – on, pour la restauration de la lignée royale.

C’est le moment d’impliquer les chefs traditionnels dans la résolution de cette crise latente, surtout qu’il ne s’agit pas d’une bataille entre deux princes du défunt. Les autorités administratives ne devraient pas attendre qu’il ait des victimes pour appeler les gardiens des traditions à la rescousse. Bangou étant traditionnellement lié au département du Ndé et groupement du département des Hauts Plateaux, le Ministre de l’Administration Territoriale  pourrait envisager une rencontre avec les chefs traditionnels desdits départements pour trouver une solution à cette situation qui depuis plus de 3ans, a paralysé les activités culturelles et traditionnelles, ainsi que toutes les initiatives socio économiques de Bangou. Ainsi, le peuple Bangou suffisamment chauffé à blanc, saura digérer la décision du MINAT, par ce que prise à l’issue d’une concertation avec des personnes assermentées. Avec le soutien de certains « monarques », le groupement Bandenkop dont le chef avait été en exil avec SM Paul Bernard Kemajou, avait pu rétablir sa lignée royale sans autant de heurts. Revenant à la lettre du MINAT au Préfet des Hauts Plateaux, « …La décision prise peut être rapportée, s’il est établi que l’autorité compétente a été induite en erreur ».Article 15 du décret du 15 Juillet 1977. Le ministre Paul Atanga Nji peut donc s’en servir pour donner la chance à une solution définitive à  l’affaire qui mine la chefferie  Bangou et l’histoire retiendra qu’il fut l’homme de la situation.

© Alexis YANGOUA

 

 

 

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