Les 25, 26 et 27 Janvier 2021, les commerçants du marché A de Dschang ont fermé les boutiques et se sont déportés à l’esplanade de la mairie pour protester contre certaines décisions du conseil municipal. Sans surprise, certains acteurs politiques y ont trouvé matière à animer leurs activités.
Voici ce que stipule l’article 121 de l’acte Uniforme OHADA révisé portant sur le droit commercial général « Sauf stipulation contraire du bail, toute sous – location totale ou partielle est interdite. En cas de sous – location autorisée, l’acte doit être porté à la connaissance du bailleur par tout moyen écrit. A défaut, la sous – location lui est inopposable ». Dans un communiqué en date du 28 Janvier 2021 relatif à cette grève, le maire Jacquis Gabriel Kemleu avait fait mention des précisions en quatre (4) points ; entre autres le rappel de cette disposition de l’acte OHADA et le caractère illégal de la vente des espaces marchants dont la commune est propriétaire.
En outre, le magistrat municipal rappelait à toutes fins utiles qu’il n’a jamais augmenté le loyer « au regard de la délibération municipale n°004/C /DSC du 04 Avril 2010 fixant les nouveaux taux de certaines taxes communales indirectes sur l’étendue du territoire de la commune de Dschang ». D’où vient- il que certains activistes politiques continuent d’en faire un élément de leur pamphlet, alors que la démarche entreprise par les conseillers municipaux entend mettre de l’ordre dans un circuit obstrué par la sous – location et autres trafics. D’ailleurs, le taux d’augmentation évoqué et décrié par ces pourfendeurs reste un serpent de mer. Si la décision du maire et de l’organe délibérant peut se prêter aux interprétations politiciennes, le taux d’augmentation est un élément arithmétique. A combien se chiffre t – il ? Dans sa kyrielle de critiques en date du 29 Janvier 2021, le Mouvement pour la renaissance du Cameroun(MRC) à travers l’un de ces cadres locaux évoquait le contexte de la pandémie de coronavirus qui a plombé l’activité commerciale. Avis partagé, sauf que dans sa démarche, il semble incuber et entretenir le syndrome de Stockholm. Comment les commerçants locataires peuvent ils défendre avec autant d’entrain leurs supposés bailleurs qui se nourrissent sur la bête, alors que la commune en sa qualité de légitime bailleur leur offre l’occasion de devenir propriétaires ? Le MRC serait – il le défenseur des intérêts réels des commerçants ou travaille – t – il pour la perpétuation d’une petite bourgeoisie qui profite de la chienlit pour amasser autant qu’elle peut ?
Il est à noter que ce phénomène n’est pas propre à Dschang. Aux marchés A et B de Bafoussam, quelques biens immobiliers communaux ou de la ville ont fini par intégrer implicitement certains patrimoines familiaux. Des sources bien introduites parlent des comptoirs qui appartiendraient aux administrateurs civils qui ont séjourné à l’ouest, aux parlementaires et à quelques élites politiques influentes qui n’ont jamais été commerçants dans cet espace. Une nébuleuse à laquelle aucun maire n’ose s’attaquer. Le courage du maire Jacquis Gabriel Kemleu, en ce moment plus technocrate que politique, aurait pu mériter les félicitations de tout acteur épris de développement de cette collectivité décentralisée. Malheureusement, quelques esprits en ont fait un levain du populisme. Qui a dit que les actes mêmes citoyens d’un compatriote doit être jugé selon la couleur du parti auquel il appartient ? Le redressement engagé par le maire RDPC profitera à ces successeurs qui pourraient appartenir à une formation politique autre la sienne.
Le cas du marché Tsinfem pour lequel les concernés semblent ne pas s’en émouvoir, du moins pour l’instant, a retenu l’attention. « Le maire avait exigé à certains commerçants de verser 180 mois de loyers… » Pouvait – on lire dans le communiqué du MRC. Dans le compte administratif 2020 du maire, il ressort que la collecte de ces arriérés dans le seul espace commercial de Tsinfem avait atteint le chiffre de 12 400 000frs cfa. Un montant que le MRC aurait souhaité que l’édile laissât indument dans les poches des contribuables pour contenter le bétail électoral. Le recouvrement effectué au marché Tsinfem n’est donc en rien un harcèlement fiscal qu’aucun Être humain bien structuré n’aurait cautionné, surtout dans un contexte économique aussi morose. L’action citoyenne ne saurait se limiter à la condamnation systématique de l’initiative du conseil municipal de Dschang, dès lors qu’elle rentre dans le processus normal de collecte des recettes municipales. A quoi ont servi ces recettes ? A notre humble avis, cette préoccupation aurait été plus utile que la litanie de critiques dont le seul objectif serait de renforcer l’incivisme fiscal pour en tirer des dividendes politiques. C’est une stratégie politique dit –on, soit !
Les partis politiques, les médias et la société civile doivent davantage œuvrer pour la promotion de la participation citoyenne (l’un des piliers de la décentralisation) tout en restant gendarme de l’action communale. Emarger dans le budget du populisme est un piège qu’on tisse pour soi – même. De tout temps, assumer ses devoirs notamment fiscaux n’a jamais été une séquence de plaisir « Rendez à César ce qui est à César… » Disait Jésus aux Pharisiens.
© Alexis YANGOUA