Bafoussam 1er : le Maire Ngnang Cyrille abandonne l’espoir d’un retour au SDF.

L’annonce de sa rupture définitive avec le Social Democratic Front, est plus une assurance adressée à ses amis politiques et son entrée en campagne électorale, qu’un message de démission de son ‘’ex’’ parti politique.

Cette déclaration politique partisane insérée dans le discours prononcé à la clôture du conseil municipal en session du 20 Septembre 2024, peut être perçue comme du cheveu sur la soupe. La session du Conseil municipal étant supposée apolitique. Le choix du lieu, du temps et de l’instant n’était pas fortuit. C’était non seulement en présence des conseillers municipaux, tous du SDF, mais également sous le regard des autorités administratives et des services de renseignements. C’est l’acte d’un politique rodé et on ne saurait émettre des hypothèses tendancieuses. Selon ses ambitions, tous ces fonctionnaires à la solde du RDPC, pourraient être ses cibles.

Sourire caricatural aux lèvres, c’est avec un cœur certainement serré que le maire Ngnang Cyrille de Bafoussam 1er a annoncé sa rupture avec le SDF, avant de donner rendez-vous au public au mois de Novembre 2024,  pour lui indiquer sa nouvelle formation politique; celle qui portera sa candidature en 2026.

Partir c’est mourir un peu

De guerre lasse, il se sépare définitivement du parti politique qui l’a porté à la cime, du moins de sa commune d’origine. Même avec leurs auto exclusions (34 militants) en février 2023, Ngnang Cyrille et quelques uns de ses camarades n’avaient véritablement pas quitté le SDF. Le cœur y était encore. Il s’agit bien de ceux qualifiés à cette époque de G27 – Ouest, qui d’ailleurs, s’étaient rapidement brouillés avec le clan Jean Michel Nitcheu, avant que ce dernier n’aille ressusciter le RAP en FCC, aujourd’hui plongé dans un état végétatif. Même avec l’élection de Joshua Osih à la présidence nationale du parti à l’issue du 10ème congrès, ils sont restés en stand by, exigeant que « leurs exclusions soient levées » par ce qu’estiment – ils, assigner le président national de son parti au tribunal, relevait de leur droit en tant que citoyen. Sauf que le paternalisme sur lequel reposent les partis politiques africains ne tolère pas la moindre offense aux pères fondateurs. En sa qualité de maire, c’est-à-dire le leader de son conseil municipal, il s’est mainte fois montré en froid contre ceux des membres de l’organe délibérant, qui un tant soit peu, ont affiché leur contrariété par rapport à certains axes de ses décisions.

Le G27 et l’équipe du président Osih ont maintenu la guerre d’égos, ont refusé le ‘’grand dialogue’’ qu’ils ont pourtant exigé à Paul Biya quand il s’est agi du NOSO. Il y a eu des morts dans les régions du NOSO et Paul Biya que l’on connait tenace, froid et obstiné a pu organiser le grand dialogue national. Qu’il fut bon ou mauvais avec des recommandations exécutées ou pas, cette rencontre du 30 Septembre au 4 Octobre 2019 a été un cadre d’expression et d’échanges entre les camerounais. Les assignations du leader du SDF au tribunal furent une grosse faute politique certes, mais ne sauraient être comparables à de l’irréparable, c’est-à-dire un motif justifié du refus de la mise sur pied d’un cadre de réconciliation, tant réclamée aussi par Jestel Shewa, le candidat malheureux à la présidence du SDF. C’était davantage la mission première du vainqueur. Faire régner la discipline au sein d’un groupe est important. Mais, se donner la chance de remporter des sièges électifs, est primordial. C’est la raison d’exister de tout parti politique et son leader. Ronaldo, Ronaldinho, Messi, Drogba, Eto’o…n’ont pas été les plus disciplinés de leurs clubs. Tant qu’ils marquaient des buts et faire gagner le groupe, leurs dégâts étaient minimisés. Si la discipline est la mère du succès, que vaut une bande de laudateurs incapables de produire de bons résultats ?

Quel sera le visage du SDF dans la commune de Bafoussam 1er en particulier et en général dans le département de la Mifi ? Nous en saurons d’abord à l’issue de l’élection présidentielle de 2025 et ensuite, aux élections locales de 2026.

Le vase était trop plein

En début de l’année 2024, s’estimant encore personne ressource et président de la circonscription électorale (CE) de Bafoussam 1er, bien que exclu, Ngnang Cyrille avait entrepris de soutenir ses camarades dans l’opération de renouvellement et redynamisation des structures du SDF dans sa commune, selon les instructions du Comité Exécutif National. En conformité avec les statuts du parti, il désigna alors le conseiller municipal Samuel Ndié comme son remplaçant à la tête de la CE. Le bureau constitué sera élu au cours du Comité exécutif régional du 4 février 2024, en présence du 2ème vice président du parti, Louis Marie Kakdeu. À la grande surprise de tous, ce bureau de la CE de Bafoussam 1erqui en quelques semaines seulement, avait réussi à remettre sur pied une trentaine de cellules sur 61, sera rejeté par le NEC, suite à une requête aux arguments brumeux  de Defo Oumbe Sangong et ses affidés. Une situation qui mettra le nouveau régional, Maurice Nzeundie sur le grill. Pire, cet ancien député de la Mifi, forcé à se replier dans sa base natale à Bafoussam 3ème est ramené et réconforté à la circonscription de Bafoussam 1er ; en même temps, Noumba Serges Siméon qui n’est plus dans les grâces du maire Ngnang y est parachuté par le sommet du parti. Toukam André, un pourfendeur de Ngnang avant sa démission en 2013 réapparait. Il est fait président de cette CE à la place de Samuel Ndié.  Le message semblait dès lors clair : empêcher à tout prix que les Hommes de Ngnang qui jouissent d’un soupçon de popularité sur ce territoire, ne prennent le contrôle de la direction de cette unité politique, même si l’on est conscient que les trois parachutés sus mentionnés, n’ont plus les capacités réelles de faire mieux.

En réalité, Ngnang Cyrille a toujours cru à son retour dans sa famille politique. C’est ce dernier épisode, qui a anéanti son espoir et l’a convaincu de ce que la nouvelle direction du SDF ne voulait pas de ses services. D’ailleurs, lors d’une rencontre fortuite à Bafoussam, Ngnang Cyrille s’ouvrira sèchement au Président national, Joshua Osih « j’ai finalement compris que nos sangs ne collent pas. Depuis 2007, vous êtes dans toutes les conspirations contre moi, surtout lorsque j’apporte des victoires au parti. Pour preuve, quand je perds en 2013, il n’y a pas de problème et Bafoussam 1er est calme.  Quand je vous ai appelé en 2020 pour vous annoncer notre victoire à nous tous à Bafoussam 1er, vous m’avez  rabroué au téléphone et mes problèmes ont repris. En 2018, je me suis investi dans l’organisation de votre campagne présidentielle dans la Mifi, alors que je n’étais plus maire. Vous m’avez remercié par des accusations contre moi en plein meeting à la place des fêtes de Bafoussam… », alors que nous croyions que ces propos relevaient de la rumeur, son authenticité nous a été confirmée  il y a quelques semaines par le maire Mouafo ; « C’était à l’occasion  de l’anniversaire d’un fermier » ajoute t il, avant de conclure « Lors du passage de Osih à Equinoxe, il a osé dire que nous n’avons rien apporté au SDF. Le SDF a-t-il un siège dans le Sud – Ouest et le Littoral ? Et même ailleurs ? Nous l’avons construit à l’Ouest ».

Avec la déclaration de rupture de Ngnang Cyrille, ses camarades qui étaient plongés dans une mare sans direction, attendront le mois de Novembre comme annoncé pour se  mettre en ordre bataille. En attendant, il est fort probable que dans les jours à venir, les cellules SDF de cette CE tiennent leurs assises pour affûter leur ralliement. Les conseillers municipaux dans leur large majorité, pourraient se ranger derrière leur maire, tout en portant institutionnellement l’étiquette du SDF jusqu’à la fin de leur mandature.

Qui profitera de ce divorce enfin consommé ? 

Que le maire Ngnang Cyrille aille au rdpc ou dans un autre parti politique, son départ du SDF imposera une nouvelle définition de la carte politique dans la Mifi. Malgré ses caprices, c’est un acteur politique qui a su se faire aimer par la base. En dépit des moyens dérisoires transférés aux Collectivités Territoriales Décentralisées, l’efficience et la diligence dans sa gestion sont un gage de sa passion de servir ses citoyens. Toujours proche de ses concitoyens en temps de bonheur et dans des moments difficiles, Il sait  réjouir le cœur de son Fo’o, SM Njitack Ngompé  partant de sa cour. Les travaux de construction de la mairie qui ont créé des vagues sous le maire Jules Hilaire Focka Focka, l’actuel président du Conseil Régional, seront bientôt dans la phase de finition. Les conseillers municipaux entendent y siéger en 2025.

Sera-t-il au rdpc ? Les chances semblent minces. Mais, Sylvestre Ngouchinghe, le départemental du RDPC de la Mifi s’y mettra certainement à fond avec des promesses et assurances. En cas d’adhésion au parti de Paul Biya, Ngnang Cyrille pourrait ne pas être à l’abri du coup que le poissonnier avait infligé à François Xavier Wolong de l’UNDP .Avec les poches dit on pleines, ce dernier a été enfoui sous le boisseau politique et placé sous le contrôle rude de son camarade et boss politique, le maire Defonkou. Le RDPC éprouve des difficultés dans la commune de Bafoussam 1er et ce n’est pas l’aura du maire Ngnang qui redorera aussi aisément son blason. Il pourrait y laisser des plumes, par ce que dans son électorat naturel ou acquis, il y en aura qui se sont donnés pour mission de sanctionner le RDPC, quel que soit le porteur de la liste. Dans ce cas, il ne fera plus ombrage au SDF et aux autres partis politiques d’opposition. Pour avoir gagné le RDPC en 2020 avec un écart de 243 voix, le maire Ngnang connait mieux que quiconque, la valeur et les effets d’un bulletin de vote.

Ira-t-il au MRC qui lui a fait la cour depuis 2013 ?  Possible, avec la garantie d’une majorité des siens sur la liste électorale, afin d’assurer son élection comme maire au cours de la session de plein droit. Mais, il devra se souvenir des accords que Paul Eric Kingué de regrettée mémoire et le président national du MRC auraient passés pendant leur séjour à Kondengui. On connaît la suite. Ce fut une affaire de boulanger. Maurice Kamto sait dire Oui et Non. D’ailleurs, certains militants du MRC lui diront qu’ils n’ont pas rongé leurs  freins depuis 2012 pour sa perpétuation à la tête de la mairie, alors que d’autres lui rappelleront leur séjour carcéral, qui n’est pas encore recompensé.

Le maire Ngnang pourra rejoindre un autre parti politique d’opposition, en s’assurant  que le choix ne  déteindra pas  sur son image et détruire les acquis.

Créer sa formation politique  avec ses camarades de G27 Ouest ? Si les humeurs de Atanga Nji sont à ses faveurs. Mais, ce sera l’idéal d’y aller avec du sang neuf. Les camerounais, dont ceux de la Mifi, étant des adeptes du «  nouveau bar » et surtout avec un promoteur qu’ils affectionnent, ce parti politique pourrait rafler une bonne partie de la mise dans quelques départements de l’Ouest.

©  Alexis Yangoua

 

 

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