Ses explications et supplications n’ont pas pu calmer la colère de son peuple. SM Sahan Martin vit désormais à Mbougam, une localité de Bankim, département de Mayo – Banyo dans la région de l’Adamaoua.
SM Sahan Martin réside depuis plus d’un mois chez son oncle à Mbougam, un village perdu dans la forêt de Bankim à environ 50 km du centre ville de Magba, en passant par Matta. Selon le sous préfet de l’arrondissement de Magba, Jean – Claude Eloundou, le sort de ce chef de 3èmedegré avait été scellé au cours d’une réunion tenue le 19 Mai 2023 à la chefferie de Magba et présidée par le maître des céans, SM Ngabom III Soulé qui, il faut le rappeler avait été décoiffé, déshabillé et fait assoir à même le sol par la garde du sultan Bamoun. C’était le 4 Février 2023 au cours de la visite du héritier de Ibrahim Mbombo Njoya dans ce village du département du Noun. Cet acte peu élégant des gros bras du sultan et dont les conséquences sont chaque jour manifestes, avait fait exploser un conflit d’autorité larvé entre les chefs Tikar du Noun et le Sultan.
Sachant bien que les rapports entre le sultan et les chefs Tikar de Magba sont scrutés par l’entièreté de chacun des deux peuples, SM Sahan Martin avait pris le risque espérant que la motivation était suffisante pour inhiber la colère des siens. Que non. Le 13 Mai 2023, il s’est rendu au sultanat Bamoun dit – il pour rendre compte d’un grand projet de construction d’un centre de santé entrepris à Matta par quelques élites Bamoun. Pour ses civilités au Sultan, il ôte son chapeau. Le geste est aussitôt filmé et rendu viral sur les réseaux sociaux. Une allégeance que son peuple et certains notables de sa cour ont qualifié de haute trahison.
Depuis les voies de fait sur SM Ngamon III Soulé par la garde du sultan, les Tikars du Cameroun en général et ceux de Magba ont décidé de défendre leurs us et leur autonomie traditionnelle vis-à-vis du Sultan, par tous les moyens . « Il s’est décoiffé. C’est la dernière chose. Un chef ne se décoiffe jamais. Quand un chef se décoiffe, on doit l’introniser de nouveau, par ce qu’il a perdu son titre traditionnel. Donc, lorsqu’il se décoiffe, il ne devient plus chef » explique le notable Njipoum Sébastien, qui par aillieurs, précise que cet acte est venu s’ajouter à d’autres manquements plus graves entre autres, le bradage des terres jusqu’au site de l’ancienne chefferie de Matta sur lequel trônait une case sacrée. Des accusations que l’intéressé rejete en bloc et s’estime victime des querelles politiques montées de toutes pièces par Simon Mgbayi (13 ans conseiller municipal). Bien que très loin de son territoire, le déchu se dit tout de même réconforté par les soutiens du sous préfet de Magba et du préfet du Noun, aussi du chef Bankim, qui d’ailleurs martèle t il a condamné fermement sa destitution factice et injustifiée par des personnes non habilitées.
Démis de ses fonctions par une poignée de notables selon le sous préfet, SM Sahan Martin a été aussitôt remplacé le 28 Juin 2023 par Henri Ngnimpah, son frère cadet. Aux dires des notables rencontrés à la chefferie de Matta, le nouveau chef suit sereinement son initiation qui tiendra sur 40 jours. Après cette phase initiatique, commenceront les procédures administratives, ont indiqué le notable Njipoum Sébastien et l’élite Simon Mgbayi. Une démarche qui fait marrer Jean Claude Eloundou, le sous préfet de Magba.
L’Administrateur Civil Principal qualifie cette intronisation de simple agitation avec le soutien des notables de SM NGamon III Soulé de Magba. « C’est le chef Sahan Martin qui détient la légalité et la légitimité. L’autre n’est qu’un imposteur et il va être traité comme un imposteur. La seule chose que je peux lui demander, qu’il libère tranquillement la chefferie de Matta. Qu’il m’écrive une lettre pour dire qu’il a abdiqué. Si non, il va expérimenter la rigueur de la loi » a seriné le « chef de terre » qui dit avoir mené des actions de réconciliation sans suite. Quant au chef intronisé et topographe de formation, le développement du village est sa priorité et c’est d’ailleurs la mission que lui a confiée son peuple, ajoute t il.
Quid du décret du 15 Juillet 1977 portant organisation des chefferies traditionnelles
De toute évidence, le sous préfet de Magba s’appuie sur le décret du 15 Juillet 1977 portant organisation des chefferies traditionnelles. Notamment à son article 29 qui définit les types et conditions de sanctions qu’encourent les chefs traditionnels. L’article 30 à son alinéa 1 dispose que « le rappel à l’ordre, l’avertissement et le blâme simple sont infligés aux chefs de 3èmepar le sous préfet ». Alinéa 3 quant à lui précise que la destitution des chefs de 3ème degré est « prononcée par le Ministre de l’Administration Territoriale ». À la lecture de la procédure légale sus évoquée, l’équipe actuellement aux commandes de Matta a du souci à se faire, même si le calme qui règne dans le village, donne à croire qu’elle jouit de l’onction d’une bonne partie du peuple.
© Alexis YANGOUA.
à Matta et Mbougam