Éducation de Base : le gouvernement ponctionne annuellement le paquet minimum sous le regard médusé des bénéficiaires.

Plus la décentralisation semble s’ancrer au Cameroun, mieux se font illustrer quelques acteurs aux esprits réfractaires à ce mode de gouvernance,  disposé par la constitution du 18 Janvier 1996.  Le  cas du paquet minimum dont les moyens transférés ne cessent de décroitre .

C’est l’une des compétences transférées aux communes par le ministère de l’Education de Base. Le paquet minimum est ainsi un ensemble composé de matériel didactique varié et de fournitures scolaires devant permettre aux instituteurs , d’amorcer l’année et de pouvoir dispenser les enseignements dans de meilleures conditions.

Au départ, c’était régulièrement posé le problème de la qualité des fournitures livrées  et proposées  aux utilisateurs. Les arrangements entre les maîtres d’ouvrage ou les commissions de passation des marchés ,et les prestataires  produisaient très souvent un matériel de qualité très exécrable,  au grand dam des bénéficiaires. Suite à de nombreuses plaintes portées à l’attention du public par la société civile et le Syndicat National Indépendant des enseignants de Base, les améliorations notables ont été faites. Certains édiles bien conscients de l’importance de ce segment de l’éducation de la jeunesse, y ont quelque  fois mis du leur pour fournir un paquet minimum un peu plus consistant  aux établissements de leurs circonscriptions communales.

L’année scolaire 2022/2023 avait connu un phénomène inhabituel.  Arrivés au mois d’août comme par le passé, les cartons de crédit seront immédiatement retirés par l’expéditeur qui est le ministère des Finances, alors que les mairies étaient sur le point de passer le marché. Ils retourneront plus tard au mois d’octobre, amputés des frais de colisage. Dans certaines communes, les maires avaient dû puiser dans leurs ressources pour combler le gap, tandis que d’autres  responsables d’école s’étaient débrouillés pour transporter les colis  dans leurs localités, parfois bien lointaines du lieu de distribution.

Cette année 2023/2024, le ministère des Finances et  son homologue de l’Education de Base ne se sont pas limités à la suppression des frais de colisage, ils ont entamé le crédit. Certains maires déplorent une dimunition de plus de  6 millions frs cfa par rapport au montant obtenu  l’année  dernière.Les trafics qui parsèment la gestion du fonds alloué ne pouvant reculer, le paquet minimum a pris un grand coup et les enseignants suffoquent de colère. Les directeurs d’école seront contraints de faire recours aux fonds de l’APEE (Association des Parents d’Elèves et Enseignants) pour satisfaire le personnel. Déjà, ces fonds très modiques recouvrés difficilement pour le cas des zones rurales, ne parviennent pas à couvrir les charges salariales des  »maîtres de parent » qui malheureusement, malgré les contractualisations, constituent l’essentiel du personnel.

Dans le contenu du concept « Ecole intelligente », qui sous tend sa politique communale en matière d’éducation, l’honorable Hermine Patricia Ndam Njoya, maire de la commune de Foumban attirait déjà l’attention du ministère de l’éducation de base sur le caractère désuet de « Paquet minimum ». Nous sommes en Octobre 2020, 8 mois seulement après leurs élections. Elle proposait alors la responsabilisation des écoles «  A la commune de Foumban, par rapport au Cameroun qui est un grand pays, nous souhaitons  avec la décentralisation,  qu’au niveau de nos communes, nos écoles puissent être responsabilisées et puissent avoir des budgets, puissent s’organiser. Qu’il y ait des conseils d’administration dans des écoles où la communauté éducative va dire et prendre conscience de ce qui lui faut et prendre la responsabilité d’avoir sans passer par ce genre de gymnastique qu’il faille dépasser.  Pour nous, le concept du paquet minimum était pris par ce qu’il y avait une crise et il fallait faire quelque chose. Nous pensons que de plus en plus, il faudrait que  les écoles soient  responsabilisées. Et que les écoles s’organisent  comme une institution »avait-elle suggéré. Les décideurs devraient y penser et les bénéficiaires à leur tour, devraient y réfléchir dans l’optique d’un plaidoyer.

Si la situation persiste, il faudra s’attendre à une augmentation des frais d’APEE dés l’année prochaine. Que feront ces établissements scolaires et ses élèves de ‘’brousse’’ dont les parents vivent dans une extrême pauvreté ? Juste au suicide décidé et imposé par une politique publique  inconséquente.

© Alexis YANGOUA

 

 

 

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