Politique de développement féministe : L’Hon Patricia Tomaïno Ndam Njoya décrypte les codes du mal au Cameroun

Intervenant au cours du débat ce 15 mars 2023 sur cette nouvelle politique publiée au début du mois par le ministère du gouvernement fédéral allemand chargé de l’aide au développement économique, le maire de Foumban a été incisive dans les «  réponses adaptées pour promouvoir l’égalité de genre et réduire les discriminations ». Elle a mené la réflexion sur le terrain politique.

Dans un panel constitué de femmes triées sur le volet, la femme politique la plus combative du Cameroun a très vite pris la thématique à son compte en suscitant des applaudissements nourris de l’assistance à chaque réaction. C’est le lieu de dire qu’en la conviant au nombre des intervenants, des débatteuses sur cette thématique qui irrigue à l’avenir l’aide au développement économique de l’Allemagne, le Giz a frappé en plein de le mille. Pour exposer le mal du développement féministe dans le domaine politique, elle tient tout d’abord à définir ce qu’est la politique. « La politique est définie comme l’art de gérer la société. Il faut bien qu’on parte de là », livre-elle d’emblée. Elle poursuit en indiquant qu’au Cameroun, c’est bien clair que les autorités qui sont chargées de diriger tiennent leur pouvoir des élections. Les élections au Cameroun sont le fait des partis politiques. « Pour être député, pour être maire, il faut partir d’un background politique. Il faut être engagé politiquement », relève la patronne politique de l’Union démocratique du Cameroun. A l’observation, questionne-t-elle, les contextes, social, économique, culturel ou même politique permettent-ils aux femmes de s’engager au militantisme politique ? Parce que précisément la politique est vraiment une question d’engagement, la réponse à cette question est loin d’être affirmative. « Chez nous généralement, on va constater que celles qui sont engagées sont « la fille de », « l’épouse de », on est « la belle-sœur de ». Ce sont des défis qu’il faut mettre sur la table », tranche-t-elle. Par ailleurs, au sujet de la représentativité des femmes à tous les niveaux de la société, la portion réservée aux femmes est incongrue. « Au Cameroun, il y a 360 communes. Et à la tête de ces communes moins de 40 maires sont des femmes. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond avec ce chiffre surtout quand on sait que plus de la moitié de la population est féminine. La fonction de représentativité qui est élective aurait dû propulser par exemple les femmes à la tête des mairies. Cela signifie donc qu’au niveau de la représentativité il y a beaucoup d’entraves à l’égard des femmes », soutient en observatrice avertie de la scène politique nationale, celle qui préside aux destinées de l’Udc. Le Cameroun est une République, et parce qu’elle est dirigée par des lois, ces normes devaient à son sens encadrer, protéger les droits des uns et des autres, et surtout ceux des femmes dans ce cas précis. En outre, en tant que politique, il y a lieu d’indiquer qu’il est fondamental au niveau de l’organisation, des lois, de pouvoir permettre à toutes les femmes d’avoir accès à cette représentation et aux centres de prise de décision. Le gouvernement aurait dans ce sens permis qu’au niveau des institutions politiques, il y ait la parité entre les hommes et les femmes. C’est ce qu’il est convenu d’appeler l’égalité des genres.

Les droits de la femme en question

Pour clarifier cette situation, l’édile de la ville de Foumban a indiqué qu’au Cameroun, il y a des « inégalités marquantes ». «Je m’appelle Tomaïno, c’est nom que ma mère m’a donné quand je suis née, Ndam Njoya est le nom acquis en entrant dans une vie de couple. Maintenant, sur ma Carte nationale d’identité c’est Tomaïno épouse Ndam Njoya, pourquoi épouse ? C’est une inscription qui crée une discrimination. Ça pouvait être Ndam Njoya née Tomaïno. Il faudrait que la loi accorde un choix de porter ou pas le nom de l’époux », assène-t-elle en prenant l’exemple sur elle-même en tant que femme pour mieux se faire comprendre. Dans ce sens, elle poursuit sur le terrain des droits de la femme entravée en indiquant que la loi au Cameroun reconnaît la polygamie. De ce fait, un homme peut avoir une, deux, trois ou quatre épouses. « Pourquoi dans un contexte d’égalité de droit et de devoir, la femme ne peut-elle avoir, un, deux, trois ou quatre époux ? », s’interroge-t-elle au milieu des acclamations nourries. Elle va plus loin par ailleurs en indiquant que sur les réseaux sociaux au quotidien, les femmes sont attaquées de toutes parts dans leur vie privée, sur leurs origines et autres sans que cela suscite pour autant quelconque indignation ou réprobation collectives. Plus loin, elle indique qu’au sein du gouvernement, il ne suffit pas de créer un ministère de la Femme et de la famille où doit trôner une femme, mais il est plutôt question qu’on puisse retrouver les ministres femmes à tous les portefeuilles.  Toujours au chapitre des droits biaisés de la femme au Cameroun, elle soulève le fait des vides sur des juridiques sur des segments importants de la vie sociale. « Il y a une absence de lois contre les violences sexistes ; il s’agit de discrimination parce qu’on est femme ! On est victime de diffamations, de traitements qui ne respectent pas les droits, il n’y a pas de lois contre les violences domestiques parce que la grande majorité de femmes au Cameroun subissent la violence à l’intérieur des maisons. Il n’y a pas un code de la famille qui protège le couple », dénonce-t-elle ! Aussi, il y a des lois désuètes qui touchent au statut matrimonial. « Si la cellule familiale n’est pas forte on ne peut rien faire. Quand je célèbre les mariages, je n’ai plus besoin de dire que l’homme est le chef de la famille parce que le Cameroun a ratifié un certain nombre d’instruments internationaux à l’exemple du Protocole de Maputo. Il est question d’une coresponsabilité. Je le dis clairement », confie-t-elle. Elle poursuit en indiquant qu’elle ne célèbre pas par exemple  les mariages de moins de 18 ans même si l’Ordonnance de 1981 parle encore de l’âge minimal de 15 ans. « Je parle de coresponsabilité parce qu’elles ne sont pas obligées de changer directement leur nom une fois qu’elles sont mariées. Il en est de même de la question du domicile. L’homme ne doit pas épouser une femme pour aller la laisser chez ses parents », rappelle la patronne du Conseil exécutif de la commune de Foumban qui parle d’expérience. Toujours comme entrave au droit de la femme, elle relève qu’il y a « beaucoup de discours qu’il faut changer dans les familles mais surtout au niveau étatique, il faut adopter des lois pour changer cette donne ». Comme on le voit, les droits de la femme au Cameroun sont encore en situation. La nouvelle politique de coopération de l’Allemagne interpelle les autorités camerounaises à prendre les taureaux par les cornes, pour que toutes les filles et les femmes du pays, à quelque niveau où elles se trouvent soient des actrices de développement. Ceci va en droite ligne avec la signification depuis le début de ce mois que la première puissance économique de l’Union européenne ne soutiendra à l’avenir que les pays qui promeuvent une « politique de développement féministe ». Ce qui est bénéfique à la majorité de la population camerounaise constituée de femmes.

Sources : Le Messager

Léopold DASSI NDJIJDJOU

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